La motivation chez l’enfant

« Je sais pas quoi faire », « je m’ennuie », « j’ai pas envie de faire mes devoirs » : il n’est pas rare que les parents soient confrontés à ce manque de motivation de leurs enfants. Alors comment faire, pour aider les enfants à se motiver ? Que faire pour intéresser votre enfant à l’école ? Et comment l’accompagner pour qu’il développe sa curiosité face au monde qui l’entoure ? On fait le point avec Brigitte Prot, psychopédagogue, enseignante et formatrice.

D’où vient la motivation chez les enfants ?

La motivation chez les enfants en âge d’être à l’école primaire vient d’abord du contexte dans lequel ils apprennent. Et c’est pendant cette période, entre 6 et 12 ans, que se construisent l’estime de soi et les différentes formes de la confiance en soi.

Dans leur parcours scolaire, on les a préparés aux apprentissages fondamentaux : lire, écrire, compter… Leur motivation à l’école va alors dépendre du contexte dans lequel ils évoluent. Ce contexte, ce sont les interactions avec les enseignants, les camarades et les parents. L’enfant se sent-il à sa place, pris en compte avec ses points forts et ses difficultés éventuelles ? Se sent-il en confiance avec les adultes ? Se sent-il reconnu, valorisé ? Est-ce que l’on reconnaît ses compétences, comment s’adresse-t-on à lui ?

Les enfants sont extrêmement sensibles à ce qu’on leur dit : si le parent ou l’enseignant cherche à blesser ou à humilier l’enfant, cela altérera sa motivation. Alors que s’il cherche à promouvoir, à mettre en avant les points forts et les difficultés, qui ne sont autres que des points à régler, l’enfant sera davantage motivé.

Si l’enfant a l’impression de ne comprendre que 20% de ce qu’on lui dit et s’il est en permanence confronté à ses échecs, sa motivation s’épuise.

Quel est le rôle des parents ?

À la maison, qu’est-ce qu’on dit de l’enfant devant lui, devant ses frères et sœurs, comment parle-t-on de ses compétences scolaires ? Quand un parent dit par exemple : « Ah bah toi t’as pas la bosse des maths » cela paraît anodin mais très vite l’enfant va se dire qu’il ne peut pas réussir en mathématiques.

J’invite les parents à faire extrêmement attention à bien dissocier leur enfant, en tant qu’individu, de ses résultats scolaires. Ça n’est pas parce que l’enfant a fait dix erreurs à une dictée, qu’il doit être écrit « zéro » sur son front. Ce sont ses résultats qui ne sont pas bons dans tel domaine, à tel exercice, ce n’est pas lui qui n’est pas « bien ».

Cela suppose une communication entre parents et enseignants pour l’aider quand il a des difficultés, en se fixant des objectifs à court terme : comment l’aider à trouver une réponse à ce problème, à réduire ses difficultés sur ce point, en trois semaines par exemple.

Une fois les difficultés identifiées, que faire ?

Il faut choisir un temps où le parent se sent calme et patient : donner des conseils avec son smartphone à la main risque de ne pas être efficace, par exemple.

On peut d’abord repérer ce qui va bien à l’école. Il y a toujours quelque chose de positif ! Ensuite, quels sont les problèmes ? Qu’est-ce qui n’a pas été, sur les 25 derniers jours ? Il faut partir de choses précises : les pluriels, les conjugaisons, par exemple. À partir de là, le parent accompagne l’enfant, l’aide en faisant l’exercice avec lui pour voir où ça coince.

Il faut réagir assez vite quand les difficultés sont là pour ne pas que l’enfant se sente enfermé dans ses échecs. Mais il convient de ne pas se faire trop de souci non plus, car l’inquiétude des parents va elle-même être une source de démotivation chez l’enfant.

Par ailleurs, les parents trop exigeants sont également source de démotivation. J’ai connu un garçon qui devait, le dimanche, refaire toute la semaine d’école avec son père. La barre était tellement haute que son père n’était jamais content. Quand l’enfant se rend compte qu’il ne peut jamais contenter le parent, il va se protéger en restant dans les difficultés et les échecs.

La survalorisation est également source de démotivation. Si quoi que l’enfant fasse, son parent trouve que c’est génial, il ne s’améliorera jamais sur ses points faibles : tout est question d’équilibre !

Au-delà de l’école, comment les motiver à s’intéresser au monde qui les entoure ?

Il est important de montrer l’exemple : si les parents s’y intéressent, les enfants vont s’y intéresser !

Ensuite, les solliciter sur ce qu’ils auraient envie de faire : par exemple, « Que peut-on faire pour protéger la planète ? Moins faire couler l’eau du robinet ? » OK, on installe cette mesure dans le quotidien de la famille.

C’est important que les enfants se sentent initiateurs d’idées réalisables. On peut installer des rituels, en partant de leurs idées, et les appliquer à tous les membres de la famille. Ils vont alors être très motivés !

Ensuite, on peut apporter des magazines, des ouvrages sur certains sujets ou aller en médiathèque en emprunter pour favoriser leur ouverture au monde.

Et s’il dit « j’ai pas d’idée », « je sais pas quoi faire » ?

Ces phrases sont des « phrases écran » : elles cachent autre chose qui parfois n’a rien à voir. Peut-être que votre enfant a quelque chose sur le cœur, lié à un stress ou une tension survenus la veille par exemple. Ou qu’il est occupé à autre chose et que ce n’est pas le moment. On peut poser ces questions à table par exemple, quand tout le monde est tranquille.

Beaucoup de parents prennent les « phrases-écran » comme de vraies phrases et réagissent au premier degré. Alors que la phrase-écran représente rarement la réalité : elle est beaucoup trop générale, elle ne pointe rien en particulier. Par exemple, votre enfant vous dit « Je n’aime pas l’école », au lieu de dire « Comment ça ? C’est bien l’école ! Et puis il y a des copains ! », mieux vaut lui dire « Pourquoi tu me dis ça ? Qu’est-ce qui ne te plaît pas, qu’est-ce qui est difficile pour toi dans cette école ? »

Ces temps-là sont-ils encore possibles dans une société tout écrans ?

Dans les familles où l’usage des écrans ne fait pas l’objet d’un contrat familial, il existe des situations d’addiction. S’il n’y a pas de contrôle par les adultes des écrans, on assiste à une perte d’attention, de concentration et de motivation.

Mais s’il existe dans la famille un contrat qui respecte les 3-6-9 , on va trouver des enfants avec des envie d’avancer, d’apprendre. Il faut être ferme là-dessus pour permettre d’avoir des activités physiques et créatives.

On peut aussi faire des challenges durant lesquels durant 3 jours on se passe des écrans, parents aussi. Les enfants vont alors se rendre compte eux-mêmes que c’est bien, que leurs parents sont plus disponibles.

Comment les motiver à participer aux tâches quotidiennes ?

Les enfants aiment bien qu’on leur confie des tâches concrètes, en fonction de leur âge : débarrasser la table, nettoyer l’évier après s’être brossé les dents, ranger ses jouets. Cela développe leur autonomie et leur confiance en eux.

On va pouvoir déterminer les tâches en famille. Par exemple, on peut décider qu’il faut ranger les jouets systématiquement après avoir joué. Ou alors, un jour précis dans la semaine il faut que tout soit rangé et c’est non-négociable. Cela aide les enfants à se motiver et à gérer leur temps. Si ranger ou ne pas ranger, c’est la même chose : « À quoi ça sert ? » va-t-il se dire. 

Un point clef de la motivation est l’autonomie. Pour cela, l’enfant doit d’abord se situer dans le temps et dans l’espace. En ce sens, apprendre sur un cadran à aiguilles peut être important puisqu’ on se représente davantage le temps. Le cerveau ne lit pas l’heure sur le digital, il lit les chiffres sans se représenter le temps qui passe. Grâce au cadran à aiguilles on va plus facilement mesurer le temps.


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Psychopédagogue, enseignante et formatrice, Brigitte Prot est spécialiste des questions de motivation chez les enfants et les adolescents. Intervenant auprès des parents, mais aussi à l’école, elle accompagne parents, professionnels et enfants à trouver les sources de leur motivation.


Les ressources éducatives pour accompagner votre enfant :

À lire

Deux livres de Brigitte Prot

Je suis pas motivé, je fais pas exprès, éditions Albin Michel

Guide d’accompagnement pour les parents, divers ouvrages dans la collection Tout Savoir, Hachette

À découvrir

Les trois tamis de la communication pour communiquer avec mon enfant

Les 8 clefs de la motivation chez les enfants, sur le site de Papapositive

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